Dolan s'essaie au huis clos familial, sur le mode hystérique

Insultes, hurlements, pleurs: dans “Juste la fin du monde”, en salles mercredi, l’enfant terrible du cinéma Xavier Dolan livre sa vision du huis clos familial, traité sur un mode hystérique avec un casting haut de gamme de stars françaises. “Juste la fin du monde”, sixième long métrage du réalisateur canadien de seulement 27 ans, avait été récompensé par le Grand Prix au dernier Festival de Cannes, après avoir divisé la presse.

“Tout ce qu’on fait dans la vie, on le fait pour être aimé, pour être accepté”, avait déclaré en larmes le réalisateur à la carrière météorique, en recevant son prix. “Je tournerai toute ma vie des films, aimé ou non”, avait ajouté le cinéaste, Prix du Jury en 2014 pour “Mommy”.

Pour lui, sa dernière production est son “meilleur” film et “le plus complet”.

Il est tiré d’une pièce de l’auteur français Jean-Luc Lagarce, mort du sida en 1995, “Juste la fin du monde”, que lui a fait découvrir la muse de Dolan, l’actrice Anne Dorval, la mère de “Mommy”. Louis (Gaspard Ulliel), homosexuel et auteur à succès, retrouve sa famille après 12 ans d’absence.

Mais le retour de celui qui veut annoncer qu’il va bientôt mourir n’a rien à voir avec celui du fils prodigue.

Il repartira avec son secret après avoir retrouvé une mère, un frère, une soeur et découvert une belle-soeur, le temps d’un repas de famille houleux où toutes les rancoeurs amplifiées par ses années d’exil vont exploser.

Comme toujours chez Dolan, le père est absent. Mais pas la mère, figure centrale de son cinéma.

Elle est jouée par une Nathalie Baye volubile et outrageusement maquillée, la seule à exprimer à son fils un amour que “personne ne lui enlèvera jamais”.

Une phrase qui rappelle celle que l’actrice prononçait déjà dans un autre film de Dolan, “Laurence Anyways”, à l’intention d’un fils qui voulait devenir fille.

Incandescent dans le registre du frère aîné, boule d’hostilité qui crache sa colère au visage de ce cadet trop brillant qu’il ne veut plus connaître, Vincent Cassel est la brutalité et la souffrance incarnées.

Sa jeune soeur paumée, la blonde Léa Seydoux, rêve au contraire de renouer avec un frère qu’elle a à peine connu et idéalisé. Mais là encore, la communication passe mal.

Sa belle-soeur est la seule à tenter de dénouer les fils haineux entre les deux frères, sans que l’on sache jamais exactement ce qui est à l’origine du conflit qui ronge la famille.

C’est une Marion Cotillard inattendue, maladroite avec les mots, qui joue ce personnage. Seule à échapper à l’hystérie ambiante, elle devine la raison secrète de la venue de Louis.

Dans une tonalité sombre de bruns et bleus, le réalisateur a filmé au plus près les corps et les visages. Des gros plans qui sont “nécessaires pour expliquer tout ce qui n’est pas dit”, a souligné à Cannes Gaspard Ulliel (“Saint Laurent”), évoquant l’impression d’avoir été “filmé avec un microscope” par Dolan.

Le huis clos asphyxiant d’une heure et demie où tout le monde parle, hurle en même temps sur fond de musique tonitruante, n’a que quelques rares moments de respiration.