Dieu, le travail et l'Amérique, selon Morgan Freeman, qui parle de son nouveau film "Ben-Hur"

Morgan Freeman, monument d’Hollywood à la voix de velours, qui joue dans un remake survolté de “Ben-Hur” en 3D, garde la tête froide à l’évocation de son impressionnante carrière. Depuis ses débuts comme figurant dans “Le prêteur sur gages” (1964), la filmographie de l’acteur noir s’est allongée jusqu’à 79 titres. Ils ont collectivement généré 4,3 milliards de dollars au box-office, soit presque autant que les recettes combinées de tous les films d’Al Pacino et Robert De Niro. Freeman, 79 ans, a été nommé cinq fois aux Oscars mais a dû attendre 2005 pour décrocher une prestigieuse statuette: celle du meilleur second rôle grâce au film de Clint Eastwood, “Million Dollar Baby”. Beaucoup à Hollywood estiment qu’il aurait dû remporter celle du meilleur acteur pour son interprétation magistrale d’Ellis Boyd “Red” Redding, un détenu désabusé dans “Les évadés” (1995), peut-être sa prestation la plus unanimement saluée. Cet acteur prolifique est apparu dans des comédies comme “Ted 2”, des blockbusters de science-fiction façon “Batman Begins” ou “The Dark Knight” ou des thrillers à succès comme “Seven” de David Fincher.

Il collabore régulièrement avec Clint Eastwood, pour lequel il a campé l’ex-figure de la lutte anti-apartheid devenu président d’Afrique du Sud Nelson Mandela (“Invictus”, 2009). Dans “Ben-Hur”, qui sort le 7 septembre en France, Freeman se glisse dans la toge d’un chef nubien. Lors d’une table ronde pour la sortie du remake du mythique péplum avec Charlton Heston, les journalistes lui ont demandé s’il avait prodigué des conseils à Rodrigo Santoro, l’acteur brésilien qui incarne Jésus. Car Freeman, né à Memphis dans le Tennessee (sud), a interprété Dieu dans la comédie potache “Bruce Tout-Puissant” (2003). “Jouer les divinités n’est pas si dur, si vous voulez tout savoir”, a-t-il répondu. “Les gens disent ‘Oh vous avez joué Dieu. Comment vous êtes-vous préparé? En allant à l’église peut-être?'”, a-t-il raconté avant de se couvrir le visage des mains, l’air affligé. Et de répondre: “Non. En lisant le foutu script, c’est comme ça qu’on se prépare”.

C’est en résumé ce qu’il répète en permanence aux questions sur ses rôles multiples, de professeur de neurologie (“Lucy”) à ministre de la Justice (la série “Madam Secretary”) ou autre. “C’est juste un travail”, poursuit Freeman-les-pieds-sur-Terre. “C’est ce que nous faisons, nous les acteurs”. Dans “Ben-Hur”, il donne la réplique à Jack Huston – un acteur “sééééduisannnnt!”, selon Freeman – qui redonne vie au légendaire prince juif trahi par son frère et qui devient champion de courses de chars dans les arènes de Jérusalem.

La version 2016 de cette saga de rivalité fraternelle et de rédemption, réalisée par Timur Bekmambetov, s’attaque à l’un des films phare de l’histoire d’Hollywood.
Le “Ben-Hur” de William Wyler, sorti en 1959, fut un temps le film le plus cher de l’histoire d’Hollywood avec le plus vaste plateau de tournage jamais vu. Il a raflé onze Oscars. Freeman, qui pense que l’humanité a “inventé Dieu”, estime qu’une histoire aussi religieuse que celle de “Ben-Hur” mérite d’être racontée, plusieurs fois s’il le faut. Ce démocrate, gros donateur pour la campagne de réélection de Barack Obama en 2012, et qui finance localement des initiatives contre le racisme, puise dans le vocabulaire religieux pour parler de la campagne présidentielle cette année, où l’immigration est un des sujets à controverses. “L’espérance, c’est la signification de l’Amérique”, a-t-il dit à l’AFP avec son célèbre regard pétillant.