Contre la morosité, Phoenix plonge dans la dolce vita italienne

De retour quatre ans après son dernier album, le groupe électro français Phoenix a choisi d’échapper à la noirceur ambiante et l’actualité anxiogène, avec une plongée dans la légèreté à l’italienne avec le disque “Ti Amo”. Ce sixième album studio du groupe, qui sortira le 9 juin, est une ode à la dolce vita, vision fantasmée d’une Italie de cinéma, romantique en diable.
Cette incursion s’est faite naturellement pour le chanteur du groupe Thomas Mars, qui a épousé l’Américaine Sofia Coppola dans la petite ville de Bernalda, fief historique de la famille Coppola à l’extrême sud de l’Italie.

Les deux guitaristes de Phoenix, les frères Laurent Brancowitz et Christian Mazzalai, ont aussi un lien fort avec ce pays. “C’est notre enfance, notre père (qui est italien)”, explique à l’AFP Laurent Brancowitz, “mais surtout, c’est plus une Italie comme un fantasme, le fantasme d’un endroit où la vie est douce et les choses sont belles (…), quelque chose qui n’existe pas, en fait”.

Le résultat rappelle l’italo-disco, qui fut bien plus que la simple déclinaison d’un genre inventé aux Etats-Unis, une interface entre la disco et l’électro, qui ne devait arriver que bien plus tard.

Boucles rythmiques entêtantes, synthétiseurs au pouvoir, les codes du genre se retrouvent dans le morceau “J-Boy”, dont la vidéo évoque l’ambiance glamouro-futuriste des années 80. “I’ll be standing by the jukebox / Champagne or Prosecco?” (j’attendrai à côté du jukebox / Champagne ou Prosecco?)”, chante Thomas Mars sur le titre qui a donné son nom à l’album, “Ti Amo”, accordant les paroles avec cet univers italien sublimé.

– ‘Petit espace d’innocence’ –
Le groupe était en plein travail à la Gaieté Lyrique, lieu de rendez-vous des cultures numériques, au moment des attentats de novembre 2015, qui ont marqué Paris. “La tension générale nous a forcé à faire ce genre de musique”, analyse, avec le recul, Laurent Brancowitz. “A l’époque, se souvient-il, on avait presque honte de faire de la musique aussi insouciante, mais après, on s’est rendu compte que, finalement, c’était peut-être ça justement, notre rôle dans la comédie humaine (…) dégager un petit espace d’innocence dans un monde coupable, un monde de péché”. Vingt ans après la sortie de “Party Time”, un premier CD deux titres, Phoenix assume plus que jamais son éclectisme et le mélange d’influences parfois très éloignées artistiquement.

“I was playing classics by the Buzzcocks, Battiato et Lucio”, chante Thomas Mars sur “Ti Amo”, mêlant un groupe de punk anglais et deux icônes de la chanson italienne populaire, Franco Battiato et Lucio Dalla. “Plus on avance dans la vie, plus on grandit, plus on sait que notre force, c’est d’avoir ça, une vision un peu différente du monde”, explique Laurent Brancowitz, âgé de 43 ans. “We embrace our weirdness (nous revendiquons notre étrangeté)”, dit-il en anglais. “C’est notre stratégie”.

La critique est souvent réceptive. En 2010, les Versaillais ont décroché un Grammy Awards, récompense de l’industrie musicale américaine, pour leur album “Wolfgang Amadeus Phoenix”, qui a notamment devancé Depeche Mode dans la catégorie “meilleur album de musique alternative”.

Si Phoenix n’a jamais fréquenté le sommet des ventes de disques, ses concerts sont très recherchés. Le groupe s’apprête d’ailleurs à se lancer dans une longue tournée pour accompagner la sortie de “Ti Amo”, avec des apparitions dans plusieurs grands festivals, notamment les Vieilles charrues, Montreux, Glastonbury ou Governors Ball à New York. “C’est la récompense de deux années et demi d’un travail qui nous passionne, mais c’est dur”, dit Laurent Brancowitz. “La tournée, c’est fatiguant, mais ce n’est pas dur”.

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23 mai 2017 - 09h30